Ecole

Je n’exprime (presque) plus de désaccord avec l’école, après avoir pris des coups

 



Le sujet que je voudrais aborder ici est délicat. Les relations parents / corps éducatif au sens large concentrent généralement beaucoup de passions et le dialogue serein peut à chaque instant être compromis.

 

 

D’abord on ne peut pas s’entendre avec tout le monde. Et le corps enseignant ne fait pas exception à la règle. Il y a des enseignants avec qui on s’entend dès la 1e phrase échangée et d’autres avec qui le courant passe moins bien. C’est la vie !

 

 

Ensuite la relation est triangulaire : parent / corps enseignant /enfant. De quoi corser encore plus les choses. Le corps enseignant vous parle à vous mais c’est votre enfant qui est au centre de l’échange. Peut-être trouve-t-il votre enfant ingérable et vous renvoie sa fatigue et sa frustration dans la figure. Ou peut-être à l’inverse le corps enseignant trouve votre enfant très bien mais s’offusque de vos remarques.

 

 

Enfin en tant que parent on projette tellement de nous sur nos enfants qu’on ne peut qu’être extrêmement chatouilleux quand cela touche nos enfants. Je me souviens avoir entendu quelque part « si vous voulez établir des relations cordiales (par exemple avec des collègues), pensez à leur souhaiter le jour de leur anniversaire. Mais encore mieux et plus efficace : souhaitez-leur le jour de l’anniversaire de leur enfant. Ils en seront encore plus touchés ».

 

 

Mais j’affirme que même quand on essaie de mettre beaucoup du sien dans les relations avec les écoles de ses enfants, il n’est pas facile d’exprimer le plus respectueusement possible un désaccord sans prendre de coups.

 

 

Je sais qu’il y a des parents franchement pénibles, irrespectueux, etc. C’est peut-être en partie pour eux qu’on paie les pots cassés. Peut-être que le corps enseignant est en permanence sur ses gardes et voient en chaque parent un être potentiellement pénible.

 

 

Il n’empêche. Je trouve alarmant la quasi impossibilité où on peut se trouver en tant que parent d’exprimer un désaccord. En voici quelques exemples :

 

 

        Tétine et doudou

 

Quand un de mes enfants entra à l’école à tout juste 3 ans, la directrice de l’école maternelle venait de changer et elle avait institué de nouvelles règles. Une des règles concernait les doudous et tétines. Alors que les années précédentes les plus petits avaient quelques semaines pour s’adapter, elle avait décidé que dès le 1e jour ces enfants devaient quitter leurs doudous et tétines. Pile au moment où leur petite vie était bouleversée par cette séparation que représente la rentrée des classes.

 

 

J’ai osé protester. Quand j’ai vu mon enfant en pleur (comme beaucoup d’autres) au moment de partir, alors que l’enseignante lui enlevait la tétine et le doudou, je suis allée voir la directrice (par ailleurs enseignante de la classe d’un autre de mes enfants) pour lui dire le plus poliment et respectueusement possible que je m’étonnais de cette intransigeance. Et que si je comprenais l’esprit final de sa décision, elle aurait pu laisser un peu de temps (quelques jours, tout au plus une ou 2 semaines) aux enfants pour s’adapter.

 

 

Bien qu’ayant mis un maximum de douceur et compréhension dans mon discours, apparemment elle m’en a beaucoup voulu. Et elle nous a battu froid (à mon mari et moi) pendant plusieurs mois. C’était embêtant car par ailleurs elle était la maitresse d’un autre de mes enfants à qui apparemment elle battait aussi froid.

 

 

Le plus amusant c’est que les enseignants étaient en désaccord avec sa décision et ils laissaient en cachette les doudous et les tétines aux enfants ! Inutile de dire que les enfants ont rapidement délaissé d’eux même ces objets et qu’au bout de 15 jours les enseignants n’avaient même plus besoin de contrevenir les ordres de la directrice.

 

 

        Prof hyper susceptible

 

Il y a 2 ans lorsque nous sommes revenus des USA en France, mes enfants ont repris l’école en milieu d’année scolaire (juste après les vacances de noël). Soucieuse de tout faire pour faciliter leur intégration, j’ai essayé tout de suite d’établir un dialogue avec les profs.

 

 

Pour ce faire j’ai utilisé leurs cahiers de liaison. En effet avec le plan Vigipirate renforcée on ne peut plus rentrer dans les écoles facilement et puis le matin on court d’école en école pour déposer les enfants à l’heure… Donc en attendant de prendre RV pour un échange détaillé, j’ai écrit à chacune des profs dès le 1esoir. Or l’une d’entre elles n’a pas daigné me répondre. J’ai écrit 2 ou 3 autres mots auxquels elle répondait tout au plus par « Vu ». J’ai pris RV peu de semaines après pour faire un point sur le travail de mon enfant et ses éventuelles lacunes. Or le jour du RV cette prof s’est fait un plaisir de répondre de façon ironique voire par des termes ridiculisant mes questions. Puis elle a fini par exploser en me disant « j’ai accueilli votre enfant, j’ai passé une grande partie de la 1e journée avec lui, et vous ne m’avez pas assez remerciée » ! C’était faux, j’ai encore notre échange par écrit interposé que j’ai fait lire à plusieurs personnes pour m’assurer qu’il n’y avait rien d’insultant dans mes propos. Or je l’avais dûment remerciée ! Mais je voyais surtout mon fils se décomposer en voyant sa prof malmener sa mère. J’ai donc essayé de rattraper la situation, pour lui. Je me suis excusée dans le cas où je l’avais involontairement blessée. Mais elle a eu une attitude hostile pendant toute l’année, a systématiquement refusé de nous passer des informations, etc.

 

 

A un moment j’ai décidé de parler de la situation à la directrice de l’école qui a rejeté mes propos en bloc avec violence… Mais lorsqu’à la fin de l’année scolaire mon mari et moi en avons reparlé avec la directrice, elle s’est contentée de faire une moue montrant que ce n’était pas la 1e fois qu’on lui remontait le problème. Enfin pour en avoir discuté avec d’autres parents je me suis rendue compte que d’autres avaient eu des problèmes avec cette prof.

 

 

 

On peut penser que je suis maladroite. Que je m’y prends mal et que je ne sais pas être diplomate. J’aurais pu me le reprocher moi-même. Mais je sais qu’il n’en est rien.

 

 

En effet un examen attentif m’a montré que d’autres parents rencontrent les mêmes difficultés que moi :

 

 

        Aller à la bataille frontalement et se brûler les ailes :

 

Il y a quelques années à la crèche d’un de mes enfants s’est posé la question de la peinture au plomb. En effet la crèche était installée dans un bel immeuble, ancien hôtel particulier qui malheureusement n’était pas suffisamment entretenu. Un contrôle des services ad hoc avait révélé la présence du plomb dans les peintures de certaines pièces. La direction (au sens large) de la crèche avait expliqué que les enfants ne faisaient que dormir dans ces pièces et ne risquaient donc pas de se frotter aux murs… Mais un des parents juriste de profession, avait insisté pour que les pièces en cause soient repeintes, en invoquant la loi. Les peintures ont été refaites conformément à la loi mais à contre cœur (en raison du coût que cela représentait) et j’ai entendu des responsables dire entre eux « que ce monsieur ne songe pas nous demander une place pour son 2eenfant » ! Quand on sait la difficulté de l’obtention d’une place à la crèche, on mesure l’importance de la « punition » qui lui était infligée.

 

 

        S’adresser aux délégués des parents d’élèves :

 

On peut raisonnablement penser que s’adresser aux délégués des parents est une bonne solution pour faire passer les critiques / suggestions. Or outre le fait que parfois le problème n’est pas assez général pour le confier à un délégué des parents, de par mon expérience les délégués eux-mêmes peuvent hésiter à exprimer un problème et à se faire mal voir. J’ai déjà remonté des problèmes à des délégués et j’ai aussi été plusieurs fois déléguée (avec d’autres) moi-même. J’ai déjà vu des délégués remontés à bloc, hésiter à restituer des problèmes une fois en face des personnels éducatifs (notamment en conseil de classe). Et j’en a vu d’autres l’avoir fait et s’être fait prendre à partie directement et devoir se justifier et souligner qu’ils ne sont que les messagers.

 

 

        Mentir :

 

Mentir ou déguiser les faits pour les rendre plus « présentables » peut être une autre tentation du parent d’élève. Le terme est surement fort mais la parade est réelle. J’ai de nombreux exemples de parents (dont certains des amis) qui travestissent les faits pour pouvoir être entendus. Je pense en particulier à des parents qui souhaitaient que leurs enfants soient dans la même classe et qui prétextent des problèmes de logistiques (« on se partage à tour de rôle le fait d’aller chercher nos enfants, il faut donc qu’ils soient dans la même classe »). Je pense aussi à cette autre maman qui voulait passer les vacances dans sa famille en outre-mer et décaler un peu les dates de départ pour payer les billets d’avion moins cher et a préféré dire qu’un de ses parents avait des problèmes de santé nécessitant sa venue urgente plutôt qu’affronter les remontrances de l’école.

 

 

Mentir est sûrement plus répandu qu’on ne le pense. C’est une facilité mais c’est aussi parfois un recours systématique face à un système scolaire fermé à tout dialogue.

 

 

        Ne rien dire :

 

Ne rien dire est une autre solution face à l’intransigeance de certains responsables scolaires. Quand on sait qu’on sera (quasi) systématiquement mal reçu en soulevant un problème ou en exprimant un désaccord, on peut choisir de se taire. Je connais des parents qui ont hésité à soulever une injustice faite à un de leurs enfants sachant que le petit frère ou la petite sœur devait être scolarisé(e) l’année suivante.

 

 

J’ai entendu récemment un de mes plus jeunes enfants parler d’une camarade de classe comme « mêle-tout ». Surprise par cette expression (il n’a pas l’habitude de donner des petits noms désagréables à ses camarades et celui-ci est relativement « recherché »), j’ai essayé d’en savoir plus. Il m’a alors expliqué qu’une des enseignantes de la classe avait donné ce petit nom à cette élève « parce qu’elle se mêle de tout ». Entendre ceci m’a mise en colère contre cette enseignante… Je sais bien que certains enfants sont parfois « ingérables » mais n’est-ce pas à l’adulte de prendre sur lui-même, voire en discuter avec les parents ? Donner un petit nom désagréable à l’enfant est le degré zéro de l’éducation, c’est purement et simplement méchant. J’ai réfléchi à ce que je pouvais faire. S’il s’agissait de mon enfant, j’aurais voulu être au courant, d’autant qu’il n’est pas certain que l’enfant rapporte ces propos à la maison, se sentant peut-être coupable et « méritant » ces appellations. Mais pour le moment je n’envisage pas d’en parler à l’école, par peur de représailles vis-à-vis de mon propre enfant, ni d’en parler à la mère de cette enfant (que je connais de vue), craignant être indirectement prise à partie. J’ai pour le moment simplement expliqué à mon enfant que ce n’était pas « gentil » de donner des petits noms à des camarades, même si c’est la maitresse qui le dit !

 

 

De même un autre de mes enfants m’a appris que des blagues racistes circulaient depuis peu dans son école. Il n’en est pas la cible mais ces blagues (dont il m’a raconté quelques-unes) n’en restent pas moins répréhensibles et révoltantes. Là encore je ne vois pas à qui je pourrais remonter ceci sans y mêler mon enfant, ni me heurter à des murs. Et là encore j’ai juste recommandé à mon enfant de ne pas répéter ces « blagues » ni en rire (car il n’y a rien d’amusant dans ces « blagues ») mais il le savait déjà.

 

 

J’ai par le passé dit à plusieurs reprises tout le bien que je pensais globalement de l’école en France. J’apprécie le dévouement de la plupart des profs, la qualité des repaset le souci du bien-être et de l’activité physique des enfants. Mais je trouve préoccupant qu’on ne puisse dépasser l’hyper susceptibilité de certains, qui verrouillent les choses et empêchent l’expression des désaccords constructifs.

 

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