tourisme

Little Free Library

 

une LFL à Towson, banlieue de Baltimore



Connaissez-vous le concept « Little Free Library » ou LFL ? Il s’agit de petites boîtes en forme de nid d’oiseau où sont entreposés des livres en libre service dans la ville. La 1e fois que j’en ai vu (plusieurs) c’était en 2014 à Baltimore. Vous avez la possibilité de prendre un ou plusieurs livres, de prendre autant de temps que vous voulez pour les lire et les rapporter (ou pas). Les boîtes sont en général très jolies et chacune est différente.

 

Le concept est très sympa et bien expliqué sur leur site. Ces petites bibliothèques en libre service fonctionnent principalement grâce à des volontaires baptisés « stewards » qui construisent leur propre boîte ou en commandent et achètent au management central, les remplissent de livres et les renouvellent régulièrement. La plupart des boîtes sont installées sur la voie publique mais quelques unes sont dans les jardins des stewards !

 

 

Bien que l’idée soit très sympa, je me suis rapidement posé deux questions : d’abord, quel est l’intérêt d’installer une LFL dans une grande ville comme Baltimore où il y a 23 bibliothèques municipales gratuites et des centaines de milliers d’ouvrages disponibles ? Ensuite je me suis demandé quel était le pourcentage de livres restitués ? Je me souviens en effet qu’il y a quelques années un phénomène avait percé partout, y compris en France (en tout cas à Paris et dans les grandes villes) : celui de laisser un livre dans des lieux publiques (parcs, gares, bancs publics, etc.) pour que d’autres le lisent et que votre lecture préférée enrichisse d’autres vies. Je ne sais pas combien de temps ce phénomène a duré (en particulier en France) mais je crois qu’il s’est assez rapidement essoufflé et en tout cas aujourd’hui il est complètement éteint.

 

 

Pourtant selon le site web de LFL les avantages de ce concept sont nombreux. On note entre autres :

 

 

        Contrairement à une bibliothèque municipale, « pas besoin de s’inscrire, de payer une amende en cas de retard, de chuchoter ou de se tenir tranquille, et pas de problème si vous ne ramenez pas un livre »

 

        « Chaque LFL permet au voisinage de se rencontrer et de mieux se connaitre »

 

        « Selon les commerçants locaux, elle attire du monde et apporte des clients »

 

        « Certains agents immobiliers disent que l’existence d’une LFL a fait la différence dans le choix d’acheteurs entre 2 quartiers différents »

 

        « Certaines grandes bibliothèques et associations nationales soutiennent les LFL comme faisant partie d’une stratégie de sensibilisation à la lecture et organisent des ventes de livres pour soutenir leurs petites sœurs dans certains quartiers et communautés rurales »

 

        Enfin le site précise que les « gens rapportent autant de livres, voire plus, que ceux qu’ils prennent ».

 

 

Même si j’ai quelques doutes sur le fait que la présence d’une LFL dans le quartier fasse réellement la différence dans la vente d’un bien immobilier, les autres arguments ci-dessus me semblent raisonnables et probablement tout-à-fait fondés.

 

 

D’ailleurs selon le site web de LFL, leur initiative marche de mieux en mieux, et il y aurait aujourd’hui 40000 LFL à travers les Etats-Unis ainsi que dans 70 pays. Ils disent aussi avoir pour objectif d’atteindre 100000 LFL avant la fin de l’année 2017. A noter qu’en France il y aurait 4 LFL : une à Beaumont (au sud de Clermont-Ferrand), une à Meilhaud (idem), une à Saint-Benoît-la-Forêt (au sud de Chinon) et une à Rivière (idem).

 

 

 

Mais au-delà du concept je crois qu’on retrouve ici plusieurs aspects de la vie et la culture américaine :

 

 

          Plus on a le choix mieux c’est :

 

 

Aux Etats-Unis nous avons toujours eu le sentiment qu’il y avait une multitude d’offres pour un même besoin : que ce soit sur un plan « consumériste » (par exemple une multitude d’enseignes de vêtements avec des offres toutes plus agressives les unes que les autres) ou sur le plan des services (par exemple une multitude d’offres d’animations pour la famille et les enfants tout au long de l’année), plus on a le choix, mieux c’est.

 

 

 

          Chacun doit faire sa part et contribuer à la vie locale : l’importance du bénévolat

 

 

L’importance du bénévolat dans la vie locale aux Etats-Unis est bien connue. Chacun est supposé donner de son temps et/ou de son argent au profit du collectif. Entre l’Etatisme (prédominant en France) et l’individualisme, le bénévolat est la 3e voie. Ces 40000 LFL (dont la majorité est citée aux USA) fonctionnent principalement à l’investissement bénévole des « stewards ».

 

 

 

          L’importance de la vie « locale »

 

 

Dans un pays au territoire aussi immense que les Etats-Unis, la vie locale a une importance capitale. Alors qu’en France l’ambition de l’égalité nous amène à tout centraliser (comment s’assurer que tous ont les mêmes droits et devoirs, si les règles ne sont pas uniformisées et ne viennent pas d’en haut ?), aux Etats-Unis chacun et chaque communauté est en partie responsable de son bien-être. A chaque communauté de se donner les moyens de bien vivre ensemble. C’est pourquoi paradoxalement la vie locale est bien plus importante aux Etats-Unis qu’en France.

 

 

 

          Excellent service marketing : site web, page Facebook, compte twitter, Pinterest, Instagram, Flickr, couverture média, etc.

 

 

Même si LFL est une organisation à but non lucratif (« non profit »), c’est une entreprise qui fonctionne et prospère, grâce aux fondamentaux du business et notamment à l’importance accordée au marketing. Jetez un coup d’œil à la page « Resources for the Press » du site. Il est très complet et donne d’excellents arguments en faveur de ce concept ! Normal puisque LFL est dotée d’équipes dédiées (une 20aine de personnes selon le site) qui mettent en place notamment une organisation marketing solide.

 

 

 

          Excellente animation du réseau

 

 

Il y a 2 ans, lorsque je suis allée par curiosité sur leur site web, je me suis inscrite à leur newsletter. Et elle vaut le détour ! Elle est hebdomadaire et traite de questions aussi diverses que « Faut-il bannir certains livres ? Que faire de livres violents qu’on dépose dans votre LFL ? », « Faut-il laisser les romans d’amour ? » ou plus récemment « Que faire si votre LFL est répertoriée par Pokemon Go ? Avantages et inconvénients » (article complété avec la fiche dédiée de Pokemon Go à l’attention des « stewards » qui désirent faire retirer leur LFL de la liste des lieux répertoriés, car forcément on va jusqu’au bout de la logique et on simplifie le travail des « stewards » !)

 

 

 

          L’entremêlement du caritatif et du business

 

 

 

En plus du bénévolat des « stewards », l’organisation des LFL repose en grande partie sur l’argent venant du secteur privé. C’est un autre trait caractéristique des Etats-Unis : l’argent du secteur privé est le bienvenu dans les œuvres caritatives, et on a le sentiment qu’il est toujours possible de trouver des mécènes privés désireux de contribuer au bien-être collectif. C’est un autre aspect de l’omniprésence du bénévolat, à côté de l’intervention de l’Etat (fédéral ou plus souvent local). D’ailleurs le site web de LFL le confirme : « Les organisations et entreprises locales et nationales voient de plus en plus en LFL un bon investissement destiné à démontrer leur sens de la responsabilité sociale et à faire leur part pour leurs électeurs, leurs voisins et leurs clients. »

 

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *

This site uses Akismet to reduce spam. Learn how your comment data is processed.